Cela a toujours été le cas même si, par moments, les
attaques ont été plus nombreuses et virulentes comme c’est sans doute le cas
actuellement.
Face à une telle déferlante de haine et de défiance à son
égard, sa réponse semble souvent complètement hors de la réalité, d’une
faiblesse coupable.
Dans un immobilisme et une inertie incompréhensibles, elle
semble méjuger et sous-estimer les menaces qui pèsent sur son existence même
dans une sorte d’incapacité constitutive.
Pire, elle semble être honteuse de ce qu’elle est.
Ainsi, on reste encore aujourd’hui assez sidéré par la
facilité déconcertante avec laquelle le fascisme et le nazisme ont pu s’imposer
dans deux pays démocratiques, l’Italie et l’Allemagne (le communisme, lui,
s’est quasiment toujours établi dans des pays qui n’étaient pas démocratiques).
De même, à notre époque, les succès et/ou la montée en
puissance des populistes et des extrémistes dans nombre de pays démocratiques
rend mal à l’aise et tend à faire penser que, peut-être, la démocratie n’a pas
la capacité de s’opposer à ses ennemis.
Alors, une question vient spontanément à l’esprit: est-elle
stupide?
Deux réponses semblent s’imposer:
La première est que la démocratie est fragile.
On ne le redira jamais assez, elle n’est pas un régime
«naturel» mais bien une construction culturelle qui permet à l’individu d’être
libre et égal dans un monde dominé généralement par l’asservissement et le
rapport de force.
Cette fragilité constitutive fait qu’elle est souvent
démunie face aux assauts et autres coups de main de ses adversaires qui
connaissent bien ses points faibles.
La deuxième est que la démocratie est, in fine, ce que nous
en faisons.
En clair, elle n’est qu’un kit de construction que nous
avons à notre disposition et que nous devons utiliser pour bâtir notre société
en regard des valeurs de référence qu’elle nous indique.
Le résultat de notre édifice n’est donc pas ce qu’est la
démocratie dans l’absolu mais bien ce que nous avons construit grâce à ce kit
et par rapport à ces valeurs, c’est-à-dire un système qui tend vers la
démocratie sans jamais se confondre totalement avec elle.
Mais, plus grave, nous pouvons assez facilement pervertir la
démocratie en instrumentalisant et pervertissant ses règles et ses principes,
même ses valeurs.
Cela peut être le fait de la majorité de la société mais
également de groupes particuliers (sans parler évidemment d’acteurs
extérieurs).
Dès lors, non, la démocratie n’est pas stupide mais naïve,
au bon sens du terme, une naïveté qui fait sa qualité.
Ce n’est donc pas à elle de nous protéger mais à nous de le
faire pour qu’elle nous délivre tous ses bienfaits.
C’est à nous d’être les gardiens de la démocratie dans une
mobilisation et une vigilance constantes et non de considérer qu’elle est un
roc indestructible et une donnée intangible, ce qu’elle n’est pas et ne sera
jamais.
Dans ce troisième millénaire naissant, les défis qui sont
devant elle sont vertigineux et elle ne pourra les relever que si elle est sans
cesse fortifiée par notre volonté de vivre libres et égaux, solidaires et
tolérants dans le respect de la dignité de chacun.
Sinon, elle mourra.
Jamais de sa faute mais uniquement de la nôtre.
Jamais de sa stupidité mais de notre imbécillité.
Avec cette autre question métaphysique et angoissante:
l’humain mérite-t-il vraiment la démocratie?
J’aimerais répondre que oui…
Alexandre Vatimbella
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