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14 janvier 2021

Le savoir au cœur même de la démocratie

La démocratie ne saurait fonctionner sans des individus formés et informés, capables de comprendre les enjeux de l’existence et d’analyser les situations, c’est-à-dire des citoyens responsables et respectueux.

Tout cela moi et d’autres le disent et le redisent sans cesse avec souvent des haussements d’épaules pour toute réponse.

Ce qui vient de se passer dans la plus vieille démocratie du monde et première puissance mondiale vient nous rappeler l’indépassable équation, la seule qui peut faire vivre la démocratie dans la durée.

Je rappellerai ici que le régime démocratique le plus long, celui des Etats-Unis, n’a pas encore 250 ans, une goutte d’eau dans l’Histoire de l’Humanité.

Evidemment, au cours des siècles, que ce soit dans la Grèce et la Rome antiques mais également dans les cités italiennes du XIV° siècle, on a beaucoup parlé de démocratie et de liberté, on l’a même pratiquée de temps à autre, ce qui démontre que ces deux phares humanistes ont toujours été présentes dans l’esprit des humains et ne sont pas des concepts portés par quelques penseurs et politiques.

Toujours est-il qu’à partir de la fin du XVIII° siècle, tant aux Etats-Unis qu’en France, l’idéal démocratique devient une réalité.

Oh, certes de manière imparfaite et avec des allers-retours mais les humains ont prouvé que l’on pouvait à la dimension d’un Etat-nation construire un système où la liberté et l’égalité sont ses deux mamelles et, surtout, qu’il peut fonctionner.

Mais de sa faiblesse constitutive – la confiance qu’il fait aux individus qu’ils seront responsables et respectueux – résulte qu’il ne peut s’ancrer durablement que si l’œuvre de diffuser le plus et le mieux possible le savoir à tous fonctionne.

Or, même si des progrès fantastiques ont été fait ces deux cents dernières années, nous sommes encore loin d’avoir des citoyens capables de prendre soin et de protéger la démocratie, c’est-à-dire leur liberté, leur égalité, leur fraternité et leur dignité.

Les propos tenus devant les médias et sur les réseaux sociaux par les émeutiers de Washington font froid dans le dos sur l’ignorance de cette multitude menée par quelques activistes extrémistes qui incitent à la violence et à la haine, deux comportements si faciles à susciter chez une foultitude qui s’auto-excite.

Ce sont la même logorrhée que l’on a pu entendre lors du mouvement de foule des gilets jaunes en France, des brexiters au Royaume Uni, des chavistes au Venezuela, des partisans de Bolsonaro au Brésil et de ceux de Salvini en Italie et dans bien d’autres pays démocratiques ces dernières années.

Partout des élucubrations qui bâtissent des théories du complot abracadabrantesques de la part de gens qui sont souvent d’une ignorance crasse et qui porte en eux misanthropie et intolérance au plus haut degré, ce que les médias en mal de gros titres appelle sans cesse «colère» mais qui n’est en fait qu’une ignoble rage barbare qui s’exprime évidemment le mieux quand on est entre soi et que, soudain, le «courage» du nombre, qui n’est en réalité que le plus haut degré de la couardise, permet de s’attaquer à tout ce que l’on vomit sans jamais réellement savoir pourquoi.

Et puis, après, cette odieuse audace téméraire vous fuit comme ce séditieux du Capitole interrogé par une chaîne de télévision américaine sur le pas de sa porte et qui, pour toute excuse d’avoir été reconnu comme étant entré dans le bâtiment, disait penaud parce que tout à coup seul sans ses congénères, «Je me trouvais au mauvais endroit, au mauvais moment».

Gageons que si le putsch fomenté par les partisans de Trump avait réussi, il se serait glorifié de sa présence et aurait fanfaronné avec ses amis complotistes.

Ces mêmes lâchetés se retrouvent dans tous les mouvements de foule.

Et elles s’y retrouveront tant que nous n’auront pas des citoyens dignes de la démocratie.

Car oui, c’est bien de cela qu’il s’agit.

Ce n’est pas à la démocratie de dévoyer ses valeurs, ses principes et ses règles pour s’adapter à des factieux et à des terroristes mais bien à nous, individus, de mériter ses bienfaits, bienfaits qui font que lorsqu’ils ne sont pas présents, des hommes et des femmes luttent jusqu’à donner leurs vies pour les (re)conquérir.

Soyons, habitants des démocraties, à la hauteur de leur combat en chérissant ce que tant d’autres nous envient et que beaucoup d’entre nous salissent de manière inacceptable, inadmissible et insupportable.

Et n’oublions pas que la démocratie, ça se mérite.

 Alexandre Vatimbella