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22 décembre 2018

Non au référendum d’initiative populaire

Le meilleur système politique applicable aujourd’hui est la démocratie républicaine représentative libérale.
On peut faire des plans sur la comète sur un système idéal où les citoyens correctement formés et informés, passionnés de politique et capables de comprendre parfaitement tous les enjeux qui découlent de leur implication dans toutes les décisions et, surtout, auraient le temps nécessaires pour comprendre et décider de tout et n’importe quoi, seraient à la barre du pays dans une démocratie directe que même Rousseau, pourtant défenseur de ce type de régime, savait inapplicable, non seulement partout mais plus particulièrement dans de grands pays avec une importante population.
Dès lors, il faut bâtir un système qui fonctionne.
Dans le cadre d’une démocratie, qu’on s’en réjouisse ou qu’on le regrette telle n’est même pas la question, seul la représentation dans un pays comme la France peut fonctionner.
On peut y ajouter, pour telle ou telle circonstance, ou pour des questions locales, une participation de la population encadrée et limitée à certains sujets.
Et, avec prudence, on peut, comme c’est le cas en France, instituer une procédure de référendum pour des problématiques particulièrement importantes (le vote d’une Constitution, par exemple), institué le référendum piloté par les institutions démocratiques issues de l’élection.
Mais, on sait que le référendum est une idée et une procédure venue plutôt de régimes autocratiques que démocratiques et qui permet à un leader de gouverner par plébiscites (comme ce fut le cas des deux Napoléons de notre histoire…).
N’entre pas dans ce cadre, le référendum d’initiative populaire que certains réclament et qui est une des revendications du mouvement de foule des gilets jaunes et que certains politiques ont repris à leur compte (voire qu’ils défendent depuis longtemps, comme c’est le cas des populistes extrémistes).
Celui-ci, rappelons-le, permettrait à une initiative venue du «peuple» d’être proposée au vote des Français et d’être adoptée en cas de majorité comme loi du pays.
Bien entendu, pour qu’une telle initiative soit prise en compte pour être l’objet d’un référendum, des garde-fous sont nécessaires comme un nombre minimum de signatures de citoyens, un nombre minimum d’élus qui la soutiennent et une liste restrictive de domaines qui peuvent être abordés, voire un pourcentage majoritaire pour qu’elle soit adoptée (une majorité «qualifiée» plus élevée que la seule règle des 50% plus une voix).
Néanmoins, mettre en place un tel référendum présente un risque pour le bon fonctionnement de la démocratie républicaine représentative libérale.
D’une part, si les domaines d’intervention d’une telle initiative «citoyenne» sont trop larges, on risque des référendums sur tout et n’importe quoi, surtout sur des questions fondamentales (du genre «faut-il supprimer l’impôt» ou «renvoyer tous les étrangers chez eux») ou des réactions épidermiques (le rétablissement de la peine de mort après un assassinat particulièrement horrible, la stigmatisation d’une partie de la population après un événement paroxystique, etc.) et donc l’ouverture de la boite de Pandore du populisme, de la démagogie et de l’irresponsabilité capable de détruire le lien social et de provoquer des confrontations violentes ou le chaos.
D’autre part, on peut se retrouver dans une campagne électorale éternelle, avec la succession de référendums, au cours de laquelle on met sans fin en jeu la légitimité du pouvoir en place, plus grave, du système politique en place avec un dysfonctionnement grave de ce dernier qui ne peut profiter, in fine, qu’aux extrêmes.
A l’inverse, si ce référendum n’est qu’un gadget où les questions sont sans intérêt, les domaines d’intervention restrictifs à l’extrême et la majorité pour les adopter beaucoup trop élevée, alors on en fait une sorte de jeu médiocre qui renvoie une image très négative de la démocratie.
Dès lors, soit ce référendum devient un outil de contestation en boucle du système, soit il ne sert à rien et, dans les deux cas est un danger pour la démocratie républicaine.
C’est pour cela qu’il est assez étonnant que plusieurs personnalités centristes se déclarent en faveur de l’établissement d’une telle procédure.
Faut-il leur rappeler que le Centre et le Centrisme se veulent un espace politique et une pensée politique du possible et de la responsabilité où c’est bien le peuple qui élit ses représentants après un débat politique ouvert et sans restrictive mais qu’il faut, ensuite, qu’il y ait un pilote dans l’avion et qu’il soit capable de prendre les décisions sans qu’elles ne soient remises en cause à n’importe quel moment ou que son action soit entravée par des possibles changements du socle même de sa légitimité démocratique.
Faut-il leur rappeler que la démocratie républicaine est le meilleur système que l’on peut mettre en place mais certainement pas le système idéal parce que ce dernier ne fonctionnerait pas et que l’utopie du pouvoir du peuple en direct recèle plus des méfaits que de bienfaits comme l’Histoire nous l’apprend.
Quand on voit comment les lobbies ont instrumentalisé à leur profit certaines consultations populaires dans le monde et quand on écoute certains gilets jaunes sur les domaines qui devraient concerner le référendum d’initiative populaire (changer la Constitution, abroger une loi, révoquer les élus dont le Président de la république), on voit bien que ce n’est pas la démocratie républicaine qu’ils souhaitent défendre mais bien le contraire!
Alors, oui, imaginons des voies d’une démocratie participative, mais, non, ne donnons pas aux populistes, aux démagogues et aux extrémistes, un des outils qu’ils réclament depuis longtemps pour détruire de l’intérieur la démocratie républicaine.

Alexandre Vatimbella

21 décembre 2018

La démocratie, c’est d’abord le respect de mes droits d’humains, non l’élection

Alors que l’on fête ce 10 décembre, le soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, adoptée en 1948 par les Nations Unies, il est fondamental dans un monde où le relativisme prend le pas et où les communautarismes et autres nationalismes s’en prennent à cette déclaration au nom de la soi-disant spécificité de leur communauté ou de leur culture que la défense des droits de l’humain est la première priorité des humanistes et que ceux-ci doivent s’appliquer, sans exception aucune, à tous les membres de l’Humanité.
Aucune excuse ne peut être donnée pour refuser à un individu d’être libre et égal aux autres.

D’autant plus que, dans une démocratie, ce n’est pas l’élection qui me garantit la liberté, l’égalité et la fraternité parce que je ne crois pas en la sagesse des masses qui éliraient les meilleurs qui auraient le meilleur programme et qui seraient ceux qui me protègeraient contre tous les abus à ma liberté et mon individualité ainsi qu’au lien social démocratique.

Non, ce sont le respect (du pouvoir et des autres membres de la communauté à laquelle j’appartiens) dû à ma dignité d’humain et qui se matérialise concrètement en partie dans mes droits d’humain (l’autre partie du respect étant celle qui est due à mes choix de vie soutenus par ces droits d’humain), ceux qui me garantissent que je sois libre, que sois l’égal des autres et que je puisse réclamer de la fraternité (sous forme de tolérance et de solidarité) et non le «pouvoir du peuple».

Et ce respect est le fondement même de la démocratie et, par conséquent, ces droits ne peuvent être changés sous peine d’éliminer la démocratie.

Ils n’entrent donc pas dans le pouvoir du peuple ou de ses représentants de les changer et de les abroger même si, cas improbable, 100% de la population serait pour (on ne peut supprimer ces droits naturels des générations à venir).

Ce n’est d’ailleurs que de cette manière que je puis accepter que l’élection mette au pouvoir des gens qui ne partagent pas mes opinions parce que je sais que je garderai l’essentiel, mes droits d’humain, imprescriptibles et garantis par la société.

Mais je ne suis pas naïf ou stupide comme ceux qui croient qu’il suffit d’énoncer des droits et d’établir des règles démocratiques pour affirmer que tout va bien dans le meilleur des mondes.

La démocratie et les droits de l’humain sont des joyaux fragiles qui font la grandeur de l’Humanité mais qui se protègent contre les mauvais penchants de cette dernière.

On peut voir, en ce début de troisième millénaire, le verre à moitié rempli ou à moitié vide.

D’un côté, jamais autant de gens n’ont vécu dans un régime démocratique plus ou moins parfait.

De l’autre, la montée en puissance de régimes autocratiques et totalitaires, de la Chine à la Turquie, de la Russie au Congo, du Venezuela au Cambodge, montrent que rien n’est gagné dans le combat pour la liberté et l’égalité.

Non seulement cette Déclaration universelle ne doit pas être oubliée comme une sorte de momie que l’on vénère sans la pratiquer mais elle doit être remise au cœur de la gouvernance mondiale et défendue, sans faiblesse, par tous ceux qui savent la valeur des droits de l’humain quand on les a et le prix exorbitant à payer quand ils nous ont été enlevés.

Un combat qui est éminemment centriste.


Alexandre Vatimbella


07 décembre 2018

Mais de quel «peuple» parlent les séditieux?

Tous les séditieux du moment en appellent au peuple pour déclencher la révolution qui destituera le pouvoir en place et instituera un nouvel ordre social (qui n’est pas le même pour tous…), sur fond de violences et de menaces de mort à tout va (président de la république, ministres, députés, policiers et gendarmes, personnalités diverses dont les gilets jaunes qui veulent négocier).
Mais, au fait, de quel peuple parlent-ils?
De cette multitude qui n’est capable que de mouvements de foule qui créent souvent le chaos et la désolation ou de cette entité idéale sensée représenter l’ensemble du pays et de la nation?
Mais si la première a bien une existence dans les moments de trouble comme c’est le cas actuellement, la deuxième n’existe pas.
Quand on parle de peuple dans la démocratie d’aujourd’hui (voire dans tous les systèmes politiques), on parle en réalité des individus qui, collectivement, sont assujettis aux lois de l’Etat.
Mais ces individus ne sont en aucun cas membres d’une quelconque fraternité que l’on pourrait appeler «peuple» et qui aurait le début du commencement d’une existence collective, même si on l’appelle «nation».
Ils sont avant tout des personnes qui défendent leurs intérêts individuels et qui ont toutes leurs différences ontologiques et existentielles.
Et si elles ont conscience de faire partie d’un collectif, c’est d’abord parce qu’elles sont née sur un territoire donné avec d’indéniables éléments culturels qui les rapprochent (le «mode de vie»), le tout pouvant, dans certains moments de crise aigue les amener à les défendre de menaces venues essentiellement de l’extérieur.
Comme l’explique le philosophe Hans Kelsen, «En vérité, le peuple n’apparait un, en un sens quelque peu précis, que du seul point de vue juridique: la soumission de tous ses membres au même ordre étatique.»
Et de poursuivre:
«Le ‘peuple’ n’est donc point – contrairement à la conception naïve que l’on s’en fait – un ensemble, un conglomérat d’individus, mais uniquement un système d’actes individuels déterminés et régis par l’ordre étatique.»
C’est pourquoi les centristes sont toujours plus enclins à parler aux individus réels plutôt qu’à un «peuple» imaginaire.
Or donc, de quel peuple parlent ceux qui appellent à descendre dans la rue pour renverser la démocratie républicaine libérale?
D’un troisième type qui n’est nullement l’ensemble des citoyens (même si leur fantasme leur fait espérer que cela soit le cas) mais uniquement leurs militants et leurs sympathisants ainsi que tous ceux qui peuvent trouver un intérêt au chaos, que ce soit pour la défense d’un intérêt particulier, un sentiment de haine pour la société ou une vulgaire envie d’en profiter matériellement par le pillage.
Ce n’est donc jamais le «peuple» qui descend dans la rue, même s’il y avait une majorité de la population à arpenter le pavé, mais des individus ou des groupes d’individus.
En revanche, on se rapproche plus d’une notion collective du peuple au moment des élections dans le sens où tous ceux qui possèdent le droit de voter peuvent alors s’exprimer et dire «la volonté du peuple» qui se déclinent évidemment en plusieurs volontés idéologiques et partisanes dont une ressort majoritaire.
Dès lors, ceux qui les remportent avec la majorité des voix reçoivent la légitimité nécessaire pour administrer le pays jusqu’au prochain scrutin.
Cependant, cette légitimité ne leur donne jamais le droit de faire ce qu’ils veulent mais de gouverner les individus en mettant en place la volonté de la majorité tout en respectant les droits de la minorité.
Les séditieux qui en appellent aux armes bafouent donc allègrement les règles de la démocratie républicaine et c’est celle-ci, in fine, qui est leur cible.

Alexandre Vatimbella

06 décembre 2018

L’internationale des ennemis de la démocratie à l’œuvre en France

Certains s’étonnent d’une alliance objective entre les haineux (extrême-droite), les envieux (extrême-gauche), les belliqueux (casseurs mais aussi assassins potentiels) et des pillards (qui profitent des troubles des autres) qui s’est manifestée dans les attaques insurrectionnelles des biens et des personnes lors des manifestations des gilets jaunes, en particulier à Paris dans le quartier des Champs Elysées.
Mais, comme le montre l’Histoire pour ceux qui veulent bien la lire, cette alliance a priori improbable est en réalité dans la normalité la plus évidente lorsqu’il s’agit d’abattre ce qu’ils honnissent le plus.
Chaque épisode de fronde, d’émeute, de soulèvement, de rébellion, de révolution plus ou moins importants a vu, partout, cette duplicité entre factieux de tous bords, rejoints par les voyous qui ont parfois fait office d’hommes de main des extrémistes.
Et la proximité entre les extrêmes sur bien des points favorisent ce mariage de raison pour semer la peur, casser et piller.
Ces émeutiers séditieux ont ainsi une allergie et un objectif communs: la démocratie libérale et son anéantissement violent.
Leurs pires ennemis sont les démocrates et, au premier rang de ceux-ci, les centristes parce qu’ils sont les défenseurs intransigeants des valeurs démocratiques.
C’est une des raisons de leur haine si forte partagée envers le Président de la république e son Gouvernement qui s’exprime dans les mots mais aussi dans les actes.
Il s’agit pour eux, dans leur stratégie du chaos, d’une entente conjoncturelle et d’un pacte contre-nature avec le diable mais qu’ils estiment inévitables pour mener jusqu’à la victoire finale leur mission destructrice et liquidatrice.
S’ils gagnent la partie, ensuite et comme d’habitude, ils se liquideront entre eux comme le démontrent tous les précédents insurrectionnels violents, de la révolution russe à l’iranienne en passant par le printemps arabe ou certains mouvements de décolonisation comme en Inde.
C’est pourquoi il est consternant de voir nombre de politiciens tentés par cette alliance objective ou espérant pouvoir en profiter pour leurs propres ambitions.
Là aussi l’Histoire est sans appel, ce sont les premiers liquidés.
Que tous ces énergumènes se flinguent entre eux, on dira qu’ils l’ont bien cherché et l’on ne pleurera guère sur leur destinée tragique.
En revanche, auparavant, ils auront semés la désolation, détruits, assassinés et institués un nouveau régime totalitaire.
Quant à ceux qui ont fait nombre pour permettre aux ultras de fomenter et d’engendrer ces déchainements de violence, une fois l’objectif atteint par ces derniers, ils seront, comme d’habitude, balayés comme de vulgaires faire-valoir, voire éliminés.
C’est pourquoi, au-delà des différences idéologiques, tous les vrais démocrates ne doivent pas hésiter à, non seulement, dénoncer cette internationale des ennemis de la démocratie, mais à s’unir et à se préparer à toutes les résistances nécessaires.
Heureusement, nous ne sommes pas encore au point de non-retour mais il faut s’y préparer pour ne pas être démuni s’il se présente.
Aujourd’hui, personne ne peut dire à quel stade nous en sommes, peut-être très éloigné, peut-être beaucoup plus proche.
Peut-être que le mouvement des gilets jaunes a déjà connu son apogée, peut-être qu’il n’en est qu’à ses prémisses.
Dans le doute, aucune abstention n’est possible pour ne pas se mobiliser.
A ceux qui pensent que je suis un peu alarmiste, je dis simplement qu’il vaut mieux éviter la destruction de l’ordre démocratique que de la subir.
Car, c’est bien connu également, le désordre appelle nombre d’hésitants qui veulent en découdre dans une sorte d’happening de toutes les rancœurs accumulées, quelles s’appuient ou non sur des réalités, surtout quand les médias le légitiment ainsi que les sondages et, surtout, leurs interprétations.
Ici, il n’est pas question d’avoir peur mais d’être ferme pour défendre la démocratie républicaine libérale.
Car, n’oublions jamais cette réalité: la démocratie, régime fragile, n’est pas donnée, elle se conquiert tous les jours et elle se défend sans relâche.
Qui n’a jamais vu, au cours de l’Histoire que les peuples et les individus ont reçu gratuitement la liberté, l’égalité et la fraternité.

Alexandre Vatimbella


24 novembre 2018

Depuis l’invention de l’information spectacle, le spectacle prime sur l’information

On parle beaucoup de «fake news» dont le but serait de déstabiliser un régime politique.
Avec les nouvelles techniques de l’information (internet, câble, diffusion numérique de la télévision), ces «fausses informations» ou «infox» selon la nouvelle terminologie française, ont pris une nouvelle dimension mais elles ont toujours existé et on les nommait plutôt propagande et étaient surtout mises en route par des groupes politiques et des Etats ainsi que par des entreprises qui pouvaient tenter de maquiller de la simple publicité en information.
Aujourd’hui, n’importe qui peut diffuser sur une large échelle ces infox.
Il y avait bien sûr les attaques personnelles mensongères qui, aussi, de nos jours, ont pris une nouvelle dimension mais que l’on appelait plutôt de la diffamation.
Mais l’on oublie, dans ce débat, une dimension extrêmement importante, peut-être la plus importante de toute, c’est la transformation de l’information en spectacle.
Cette mue ne date pas d’hier, elle a commencé à la fin du XIX° siècle et a réellement pris son essor au cours du XX° siècle (ce qui permet, encore une fois, de tordre le coup à cette légende d’un «âge d’or de l’information») lorsque l’éducation du peuple couplé aux progrès technologiques a permis à la presse écrite de devenir un phénomène de masse où les différents intervenants se devaient d’attirer le chaland.
Aujourd’hui, grâce aux nouveaux canaux d’information permis par la technologie, elle s’est répandue de manière endémique.
Le fondement de l’information spectacle est que l’information est un produit comme un autre, qui doit se vendre comme un autre et que pour faire appâter le «client» (lecteur, auditeur, téléspectateur, internaute), il faut la mettre en scène, la rendre la plus attirante possible et la faire coller avec les souhaits et les désirs de cette clientèle (ce qui permet, entre autres, de faire quelques concessions voulues avec la réalité).
Et, comme pour n’importe quel produit, la forme est au moins aussi importante que le fond.
Un gros titre vendeur vaut mieux qu’un titre informatif, une image «choc» vaut mieux qu’une image documentaire…
Et, comme pour n’importe quel spectacle, la mise en scène est primordiale.
Il convient ici de ne jamais oublier que les entreprises de presse ont toujours été des sociétés commerciales dont le but est d’avoir le plus de clients possible, donc de faire le plus de profit possible.
Et quand cette caractéristique commerciale est doublée d’une volonté partisane, cela a plutôt tendance à multiplier le côté spectaculaire au détriment de l’aspect informatif.
Dans un système de concurrence, il faut donc être meilleur que l’autre.
Les quotidiens et autres supports papiers se sont livrés des luttes dantesques pendant des décennies.
Puis ce sont les radios qui se sont affrontées avant que ce ne soit les chaînes de télévision «publique» (on se rappelle les luttes entre la première et la deuxième chaîne sur l’audimat du journal télévisé de 20 heures…).
Désormais, avec un paysage audiovisuel et numérique où le nombre d’acteurs s’est multiplié, la chasse au client a pris une dimension jamais vue auparavant.
Et pour que ce client aille plutôt regarder cette chaîne d’info en continu que sa rivale, plutôt ce site internet que son alter ego, aille plutôt écouter cette radio que sa concurrente (même chose pour la presse écrite), il faut lui «vendre» l’information du mieux possible et le plus vite possible.
Le mélange spectaculaire et immédiateté produit un mélange détonnant qui, de plus, entre en synergie avec l’inculture et la mauvaise formation d’une partie du personnel journalistique (auquel il faudra bien un jour s’attaquer).
Dès lors, où est l’information citoyenne?
On pourrait penser qu’elle se trouve du côté du service public de l’information que la plupart des pays du monde possède et qui devrait remplir le rôle de permettre aux citoyens de s’informer en-dehors des problèmes commerciaux et partisans.
C’est en tout cas sa mission dans les démocraties républicaines.
Or cette mission, en particulier en France, n’est absolument pas remplie.
D’une part parce que le service public a été mis en concurrence avec le secteur privé (dont la logique demeure essentiellement commerciale, ne serait-ce d’ailleurs que pour subsister) et parce qu’il est souvent le lieu d’une intense polarisation idéologique donc partisane.
Du coup, partout on l’on va pour s’informer, nous n’obtiendront que des informations biaisées où les faits sont souvent tronqués, systématiquement mis en scène, presque toujours parasités par un commentaire qui ne dit pas son nom dans un but commercial et/ou idéologique.
Ce paysage médiatique, comme on l’a vu, n’est pas nouveau mais le phénomène de l’information spectacle (que les Américains appellent «infotainement») est désormais la normalité.
Ce qui m’amène à parler de la défense bien connue du monde médiatique (au-delà de ses dénégations sur les comportements cités ci-dessus): si nous sommes comme ça, c’est parce que le lecteur le demande.
Tous ceux qui ont travaillé dans le milieu journalistique ou ont eu affaire à lui, ont entendu cette affirmation.
Comme le public demande du spectacle, donnons-en lui comme le faisait les Romains avec les jeux.
Là, se trouve une des supercheries les plus hypocrites.
Que des entreprises commerciales cherchent par tous les moyens à vendre leurs produits, c’est une évidence et elle est même légitime (quand il n’y a pas tromperie du client).
Le problème, c’est que l’information (en tout cas dans de multiples secteurs, de la politique à l’économique, du social à l’international), n’est pas un produit comme un autre.
Qu’il existe des médias qui contentent les souhaits de certains, peu importe.
Néanmoins, il ne peut être question de tordre le cou à la réalité pour vendre du mensonge sur des informations citoyennes en prétextant que c’est le bon peuple qui le demande.
Une telle justification est contraire à la mission de la démocratie républicaine, donc à la liberté de la presse qui lui est consubstantielle.
L’information doit être vraie et le commentaire libre mais l’une et l’autre doivent être clairement séparés.
Nous ne le changerons pas et, comme le rappelait Alexis de Tocqueville, il faut préférer les maux d’une presse libre imparfaite à l’absence de liberté d’information.
Néanmoins, nous pouvons l’amender dans un sens où le citoyen, à côté de ces médias commerciaux, doit pouvoir se tourner vers un vrai service public qui respecterait, enfin, les règles journalistiques de base en matière d’indépendance, d’honnêteté et qui remplirait son rôle d’informer (avec cette volonté formatrice qui est à la base d’acquérir ce savoir qui permet au citoyen d’être une personne responsable, c'est-à-dire capable d’agir sur son existence en toute connaissance de cause).
De même, nous pouvons créer des entreprises de presse associatives qui seraient à la base d’un pluralisme partisan qui, aujourd’hui, est menacé par l’aspect uniquement commercial des médias.
Enfin, un effort très important doit être fait dans la formation, à la fois, des citoyens (notamment lors de la formation scolaire) qui doivent pouvoir décrypter et comprendre au mieux l’information qu’on leur sert mais aussi des professionnels, en particulier les journalistes, qui doivent avoir une base solide mais aussi le respect d’une déontologie qui, certes, existe aujourd’hui mais semble être un phare dont la lanterne est tombée en panne depuis trop longtemps.
Et que l’on se rappelle que si, sans liberté de la presse, pas de démocratie, sans une information citoyenne pas de vraie démocratie.

Alexandre Vatimbella