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12 septembre 2021

Vingtième anniversaire du 11 septembre et procès du 13 novembre, le télescopage bienvenu

Oui, pour répondre à cette question cliché, comme tous ceux qui sont en âge de les avoir vécus «en direct», je me rappelle où j’étais le 11 septembre 2001 et le 13 novembre 2015 lorsque j’ai appris les attentats terroristes qui ont touché New York et Paris.

Et, oui, j’ai pris immédiatement la dimension de ces deux terribles carnages d’où un télescopage bienvenu dans la commémoration aujourd’hui du vingtième anniversaire de l’effondrement des tours jumelles du World trade center et l’ouverture, mercredi dernier, du procès des responsables encore vivants des fusillades dans Paris et des assassinats des spectateurs du concert qui se tenait alors au Bataclan.

Bienvenu parce qu’il nous permet d’abord de nous rappeler que les ennemis de la liberté et de la démocratie peuvent agir et frapper fort dès qu’ils sont en mesure de le faire – ce qui pose le problème de ce qui va se passer avec le retour des talibans en Afghanistan qui ont hébergé Al Qaida, l’organisation terroriste responsable du 11 septembre – et qu’en conséquence nous ne devons, nous ne pouvons jamais baisser la garde en ce début de troisième millénaire.

C’est d’ailleurs grâce à une mobilisation de tous les instants que nous avons pu éviter des attentats de cette dimension depuis quelques années.

Ensuite, il nous permet de nous remémorer l’unité qui s’est manifestée dans toutes les démocraties du monde face à ces actes d’une sauvagerie sans nom.

Et les peuples des démocraties ainsi agressées et meurtries ont montré leur communion et leur résilience face à cette barbarie même si nous pouvons malheureusement douter un peu qu’une telle épiphanie se produise avec la même intensité dans cette deuxième décennie du 21e siècle.

Enfin parce qu’il nous enjoint de ne jamais oublier la fragilité inhérente au meilleur des systèmes politiques, la démocratie, face à ses ennemis qu’ils viennent de l’intérieur ou de l’extérieur.

Bien sûr, dirons certains, ces milliers de morts de New York et de Paris pèsent peu face aux millions de morts dus aux conflits et aux actes terroristes dans le monde qui ont eu lieu ces vingt dernières années au quatre coins du monde, de la Syrie au Soudan en passant par l’Irak ou la Birmanie, pour prendre quelques exemples des effroyables et intolérables tueries humaines qui ont rythmé notre quotidien.

C’est vrai mais ces attentats, au-delà des tragédies vécues par les victimes et leurs familles, ont cette dimension emblématique de la volonté odieuse de leurs perpétrateurs et de leurs commanditaires, d’une destruction totale de la liberté et de la démocratie dans les deux pays qui ont inventé leurs formes modernes, les Etats-Unis et la France.

C’est en cela que nous devons sans réserve les commémorer et rendre justice à leurs victimes aujourd’hui et demain, aussi longtemps que notre dignité humaine sera mise en danger par des illuminés et des criminels de la pire espèce.

Alexandre Vatimbella

 

06 septembre 2021

96% des Français veulent du respect mais lequel?

Il y a, concomitamment, une demande de plus de respect dans la société et une absence de plus en plus grande de sa pratique.

Peut-être que cette forte demande ressort de cette immense absence.

J’ai dit maintes fois que le respect était la vertu la plus importante dans une démocratie républicaine et que cette dernière devait devenir en ce 21e siècle, une «respectocratie» tant la demande était prégnante et tant l’absence était ressentie dans des sociétés où monte inexorablement cette autonomie qui n’est pas celle, responsable, qui devrait légitimement accompagner la liberté mais sa perversion, celle qui est égoïste et égocentrique, celle qui réclame constamment de l’assistanat, celle qui porte fièrement son irresponsabilité, celle qui demeure constamment insatisfaite et, enfin, celle qui est complètement irrespectueuse de l’autre.

Mais, attention, la réalité de cette demande de respect ne doit pas cacher un avatar de cette autonomie négative, c’est-à-dire que cette demande est en fait uniquement pour soi-même et ne concerne pas les autres.

Car le respect n’a de valeur humaniste et démocratique que s’il est réciproque, symétrique et transitif.

Sinon, il n’est qu’un moyen de négation de l’autre, de domination sur l’autre quand il est réclamé sans contrepartie et fait alors furieusement penser à une société d’états comme l’était l’ancien régime avec la noblesse, le clergé et le tiers-état où le «respect» dû à ceux d’«en haut» n’était qu’un asservissement de ceux d’«en bas».

C’est d’ailleurs une des origines des règles de la politesse, politesse qui, seule, n’est qu’une hypocrisie si elle n’est pas reliée au vrai respect.

C’est pourquoi quand les Français expriment dans un récent sondage à 96% que le respect est la «valeur» la plus importante pour eux (et 75% qu’elle est «très importante»), on doit s’en réjouir tout en demeurent vigilant sur ce qui se cache derrière.

S’il s’agit autant d’une demande de reconnaissance de sa dignité que d’un mouvement altruiste et empathique, alors nous sommes sur la bonne voie.

Si l’on est dans ces phénomènes de la «sur-égalité» et de la «sur-reconnaissance» où toute demande de ce genre se base sur une demande égoïste et égocentrique d’être plus égal que l’autre, alors nous allons vers une société de plus en plus dure et violente.

L’absence de réel respect n’est pas une donnée nouvelle mais elle a pris une dimension nouvelle avec les progrès de la démocratie qui semblent parfois s’être accomplis en oubliant sur quels fondements celle-ci doit reposer pour ne pas être qu’une caricature licencieuse d’elle-même.

Alexandre Vatimbella

03 septembre 2021

Les défaites inquiétantes mais logiques de la démocratie

De Hongkong à Kaboul, de Brasilia à Budapest, de Manille à Ankara, la démocratie a subi ces dernières années, voire ces derniers mois et ces dernières semaines des défaites inquiétantes.

Alors que les plus optimistes escomptaient il y a trente ans qu’une grande partie du monde allaient adopter tôt ou tard un régime démocratique, ce début de 21e siècle a été une douche froide même si la liberté a pu progresser ici ou là mais pas de la manière exponentielle prévue et espérée.

Si beaucoup de pays ne se sont finalement pas convertis à la démocratie, le plus préoccupant est le recul voire la disparition de celle-ci dans plusieurs endroits où elle était en place ou embryonnaire.

Reste que ces défaites sont logiques si l’on se place dans un cadre géopolitique (pour Hongkong ou l’Afghanistan) ou dans celui de particularismes locaux (pour la Hongrie ou la Pologne).

Que nous apprennent, plus globalement, ces revers et ces fiascos?

D’abord que la démocratie est fragile de par sa nature.

Il s’agit même du régime politique le plus vulnérable car sa force réside dans ses idéaux qui sont autant d’armes qui permettent à ses nombreux ennemis, tant intérieurs qu’extérieurs, de l’affaiblir.

Un exemple, la liberté que la démocratie offre est une aubaine pour tous ceux qui rêvent de la supprimer car elle leur permet d’agir et de parler sans être l’objet de répression ou de censure comme c’est le cas dans les régimes autoritaires et totalitaires.

Ensuite que la démocratie doit se défendre et être défendue pour exister.

Elle n’est nullement un régime «naturel» mais bien une construction culturelle qui s’appuie, en revanche, sur des droits «naturels», c’est-à-dire attachés à la dignité de chaque être humain dès sa naissance –même s’il ne peut alors les exercer lui-même –, dont il ne peut jamais être privé et qui émanent du duo inséparable liberté-égalité.

Cela implique qu’elle doit se défendre par un arsenal législatif et sécuritaire efficace mais aussi qu’elle doit être défendue par ceux qui bénéficient de ses bienfaits.

Parce qu’il est une évidence que la passivité, pire l’indifférence, sont des comportements qui minent et détruisent la démocratie de l’intérieur.

On vient d’en voir les conséquences tragiques en Afghanistan où aucun mouvement d’aucune sorte de la part de la population pour empêcher les talibans de reprendre le pouvoir ne s’est manifesté, ni une quelconque mobilisation pour défendre la liberté.

Puis que l’on doit protéger la démocratie contre elle-même.

En ce 21e siècle, la caractéristique première d’un régime démocratique est qu’il ne peut être à la merci de la versatilité du peuple.

Aucune volonté de celui-ci ne peut remettre en cause son existence parce qu’elle nierait les droits «naturels» dont j’ai parlé plus haut.

Ainsi, ce n’est pas la règle de la majorité, ni même l’élection qui est fondement de nos démocraties actuelles, mais les droits de la minorité qui ne peuvent jamais être supprimés.

Ne resterait qu’un représentant de cette minorité, il serait fondé à demander que l’on respecte ses droits même si la majorité décidait de les supprimer parce qu’elle n’aurait aucune légitimité d’agir pour autrui ainsi que vis-à-vis des générations à venir.

Enfin, que les démocraties, à travers le monde, doivent s’unir pour défendre leur modèle et être capables de faire face à tous les régimes liberticides pour leur imposer de respecter les droits «naturels» de chacun.

Pas besoin de longs développements pour constater qu’on en est bien loin…

Reste que ces échecs de la démocratie ne sont pas forcément inexorable dans le temps mais ils nous apprennent encore une fois que si elle est l’unique régime légitime en regard du respect de la dignité de chaque être humain, des forces puissantes et souvent bien organisées tentent par tous les moyens d’empêcher son installation et quand c’est le cas, luttent pour l’éliminer.

Ainsi, qu’on le déplore ou non, la démocratie se mérite parce que nous vivons dans un monde où ces forces sont quotidiennement à l’œuvre pour asservir les individus pour tout un tas de motifs les plus abjects les uns que les autres.

Cela ne remet aucunement en question cette légitimité de la démocratie mais interroge sur les capacités des peuples à se révolter face à des pouvoirs autoritaires et totalitaires parce que s’il est une chose certaine, c’est qu’aucun de ceux-ci n’a jamais pu se maintenir sans un certain soutien ou une apathie coupable populaires.

Par un retournement funeste de l’Histoire, Le 21e siècle sera peut-être celui de la résistance démocratique alors qu’il devait être celui de la liberté triomphante…

Alexandre Vatimbella