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09 décembre 2020

Le XXI° siècle, siècle du populisme et des totalitarismes?

Cela devait être l’ère des démocraties.

Une sorte de splendide achèvement à cette démocratisation du monde qui avait pris son essor après la Première guerre mondiale puis qui avait presque été anéantie dans les années 1930 avant de redémarrer dans ce qui semblait une marche glorieuse et porteuse d’espérances infinies après 1945 qui s’était muée en parade triomphale dans les années 1980 avec la chute du communisme, le repli partout des dictatures et, corrélativement, la naissance de régimes démocratiques aux quatre coins de la planète.

D’ailleurs, en ce début de XXI° siècle, une majorité de pays ne se revendiquent-ils pas toujours comme des démocraties et il est certain que l’on compte plus de démocraties (réelles, celles-ci) qu’à la fin de la Deuxième guerre mondiale.

Néanmoins, ce que l’on observe surtout c’est la montée en puissance des «démocraties illibérales», terme totalement impropre pour désigner ce que certains appellent plus justement des démocratures (de démocratie et dictature, dans cet ordre) et que je préfère nommer des dictacraties (de dictature et démocratie, dans cet ordre) ainsi que la radicalisation des régimes déjà autoritaires dont certains sont devenus carrément des dictatures qui n’ont rien à envier à celles tristement célèbres du siècle précédent comme en Chine par exemple.

Une sorte de retour en 1930…

Certains estiment que cette situation est la preuve de la faillite du modèle de la démocratie libérale représentative au motif qu’elle n’aurait pas remplie ses promesses et que les peuples, par ailleurs, ne seraient pas capables de se servir de cet outil.

A la première affirmation, on pourrait rétorquer que les promesses des régimes autoritaires et totalitaires n’ont, non seulement, pas été tenues, mais que cela a engendré le chaos dans les pays qui ont été sous leur joug et dans le monde entier avec la multiplication des conflits armés dont l’épisode cataclysmique de la Deuxième guerre mondiale est le plus emblématique.

A la deuxième affirmation, il faut rappeler que la démocratie est un pari sur l’humain, celui de la liberté, sachant que si celle-ci est son bien le plus précieux, elle a aussi un prix et une exigence que certains ne veulent pas payer et rechignent à faire les efforts nécessaires sans même parler de l’incapacité de la vivre qui est un défi constant pour tous ceux qui estiment qu’elle demeure le meilleur système qui puisse exister.

De même, une démocratie exige un peuple formé et informé pour que chacun de ses membres soit un citoyen responsable et respectueux de l’autre, un challenge considérable, voire colossal, que beaucoup estiment démesuré et qui n’a pas été couronné d’un succès indiscutable jusqu’à présent, il faut bien l’avouer.

En revanche, cette incapacité à vivre la liberté de manière responsable, du fait d’une inaptitude à pouvoir en appréhender correctement les règles et même souvent à les dévoyer, abouti à l’inverse du pari démocratique.

Tout cela rappelle qu’il a suffi d’une crise économique pour que les Allemands s’offrent à Hitler (la défaite de 1918 n’étant pas une des raisons principales de son accession au pouvoir même si elle fut instrumentalisée par les nazis), un peuple que l’on considérait alors comme un des plus matures et des plus formés.

C’est dire que sans réelle protection, la démocratie, dans l’attente d’une maturation des populations qui la vivent, risque de disparaitre dans la durée d’autant qu’elle contient les germes même de sa destruction par la liberté qu’elle offre aux ennemis de la liberté, non pas ceux de l’extérieur mais bien ceux de l’intérieur même des pays qui vivent sous sa loi.

Si l’on est lucide, force est de constater que les événements récents confirment une appréhension pessimiste d’une disparition progressive de la démocratie dans les décennies qui viennent avec l’émergence de régiment plus ou moins autocratiques, voire même de totalitarismes là où elle est encore établie aujourd’hui.

Est-ce inéluctable?

On aimerait bien répondre par la négative mais les arguments manquent pour étayer une telle affirmation.

Alexandre Vatimbella

 

30 novembre 2020

Information + formation + Participation = Citoyen responsable + Personne respectueuse

Un individu possédant la connaissance, capable de l’utiliser (c'est-à-dire informé et formé) et participant est la condition nécessaire et indispensable à l’existence d’un citoyen responsable et d’une personne respectueuse, seule condition incontournable afin de pérenniser et de développer la démocratie républicaine.

Information + Formation + Participation = Citoyen responsable + Personne respectueuse, est donc l’équation catégorique pour qu’une démocratie républicaine existe réellement, c'est-à-dire fonctionne concrètement et ne soit pas que des mots écrits et des propos énoncés.

Il faut que l’individu soit correctement informé et formé par tout ce qui concoure à la transmission du savoir (famille, école, médias, entreprises culturelles, etc.) pour avoir les connaissances adéquates et l’esprit critique qui lui permet de les utiliser correctement, et qu’il participe activement et obligatoirement à la vie publique, d’une part par un service civique divisé en plusieurs missions au cours de son existence et, d’autre part, en prenant part à des décisions qui l’implique directement (pour avoir le sentiment d’être un rouage essentiel de celles-ci mais également d’être responsable de leurs implications concrètes) afin qu’il soit un citoyen responsable – de sa vie et des décisions qu’il prend – et une personne respectueuse de l’autre.

Le vrai citoyen c’est une personne en capacité de pouvoir effectivement exercer ses droits et comprendre ses devoirs sinon il n’est qu’une simple fiction voire même un danger pour la démocratie républicaine autant que pour lui-même puisqu’il n’est pas en possibilité de défendre ses propres intérêts en toute connaissance de cause.

Pour que cela soit effectif, il doit être bien informé et formé tout au long de son existence.

Une chose est sûre et certaine: sans la détention de ce savoir et de savoir l’utiliser, l’individu n’a aucune chance de pouvoir choisir ce qui est bien pour lui et la communauté où il vit.

Quant à la participation, en démocratie, elle est tout autant un droit qu’un devoir.

Surtout, elle n’est pas une perte de temps parce qu’elle est, tout à la fois, un instrument d’inclusion et un moyen de cohésion sociale.

Elle produit également du concret au service de la collectivité tout en impliquant le citoyen et le rendant, à la fois, serviteur et bénéficiaire de celle-ci ainsi que son protecteur.

Participer en tant que citoyen à la vie de la cité doit être un droit mais c’est également un devoir.

Dès lors, il faut, non seulement, pouvoir participer mais l’on doit participer sous forme d’un service civique et l’on doit être responsable des décisions collectives prises parce que, d’une manière ou d’un autre, on y a participé.

C'est-à-dire que cette participation qui aboutit à décider des choses doit être accompagnée de la responsabilité de celui qui prend des décisions et non pas, comme c’est trop souvent le cas dans la démocratie représentative où, après avoir élu ses représentants, le citoyen les critique systématiquement en estimant que leurs décisions ne sont pas légitimes, qu’il a le droit de les remettre en question parce qu’il ne se sent pas responsable des décisions prises par ceux là même qu’il a pourtant élu.

S’il participe effectivement aux décisions, puisque c’est de cette absence de participation dont il se plaint pour remettre en cause la légitimité de celles qui sont prises par ses représentants, il faut qu’il en soit responsable, c'est-à-dire que comme ses décisions auront des conséquences, il doit assumer leur positivité et leur succès (ce qui ne semble pas difficile…) mais également et surtout leur négativité et leur échec, sans échappatoire, sans pouvoir se défausser sur un autre, le désigner comme l’unique responsable, voire le coupable.

Il doit alors accepter les conséquences de ses actes en toute responsabilité.

Un citoyen dans une réelle démocratie républicaine représentative et participative ne peut donc pas se déclarer irresponsable, tout comme il ne peut pas refuser des devoirs actifs s’il veut avoir des droits tout aussi actifs.

La participation doit donc prendre l’aspect de périodes obligatoires de service civique dans différents domaines que peut éventuellement choisir le citoyen (le social, le militaire, le culturel, le sanitaire, l’économique, etc.) au-delà même d’une participation aux décisions dans le cadre de débats organisés, de prises de parole, de pétitions voire d’éventuelles consultations populaires avec, évidemment, une délimitation très claire des domaines d’intervention et du degré décisionnel entre le citoyen et ses représentants.

L’idée derrière cette participation qui est tout autant un droit qu’un devoir, est qu’il est concevable qu’un vrai gouvernement par le peuple (le troisième commandement d’Abraham Lincoln du gouvernement démocratique qui est du peuple, pour le peuple, par le peuple) transforme mécaniquement ce dernier d’une posture d’irresponsabilité chronique et assumée à une responsabilité effective, et cela change tout.

Car ce peuple, collectivement, devient alors comme le citoyen individuellement, non seulement décideur et que comme les décisions qu’il prend, créent de la réalité, il doit assumer la responsabilité de celles-ci sans échappatoire, sans possibilité d’aller chercher d’autres responsables que lui-même.

Il n’est donc plus, corrélativement, dans cette posture constamment revendicative et critique mais doit endosser toutes les conséquences, même celles négatives et néfastes, de ces choix alors qu’aujourd’hui il peut en rendre responsables ses représentants tout en se dédouanant de son vote qui pourtant les a installés au pouvoir.

Bien évidemment, les sociétés aussi complexes et aussi importantes en grandeur que nous connaissons dans ce XXI° siècle rend impossible l’exercice de la démocratie directe si jamais celle-ci peut fonctionner (même là où elle s’exerçait des magistrats étaient élus pour remplir des fonctions que le peuple ne pouvait prendre à sa charge quotidiennement).

Dès lors, c’est bien dans la participation (avec une sphère délimitée précisément afin d’éviter les malentendus, les confrontations et le blocage des institutions) que l’on peut et que l’on doit trouver la solution.

Mais une chose est sûre: sans information, sans formation, sans participation, il n’y aura pas de citoyen responsable et d’individu respectueux donc, in fine, plus de réelle démocratie républicaine, voire plus de démocratie du tout à terme.

Alexandre Vatimbella

24 octobre 2020

La faillite de l’individu responsable?

La crise de la covid19 est un révélateur symptomatique de premier ordre sur les comportements humains, non pas seulement dans ce qu’elle pourrait enseigner de nouveau ou de cacher mais également dans ce qu’elle confirme un certain nombre de réflexions sur l’évolution des rapports sociaux et des comportements individuels ainsi que de grandes tendances les concernant dans les démocraties républicaines.

Un des fondements de l’existence pérenne de ces dernières est l’émergence, par la formation et l’information, d’un individu responsable, c'est-à-dire d’un citoyen capable de savoir et comprendre où est son intérêt mais aussi, de manière tout aussi prégnante, de savoir et comprendre où est sa responsabilité dans le collectif où il vit, en un mot être un citoyen, celui qui est capable, dans le cadre du lien social, d’utiliser au mieux ses droits et de respecter du mieux ses devoirs.

Or, le système politique des démocraties du XXI° siècle semble faillir à produire une telle personne et, au contraire, à faire émerger un humain à l’autonomie irresponsable, égoïste, irrespectueux au comportement essentiellement consumériste, n’ayant retenu du savoir qu’il lui est transmis que la réalisation de ses désirs par ces droits sans se préoccuper le moins du monde du bien vivre ensemble et des règles essentielles qui sont à sa base, c'est-à-dire ses devoirs.

Et une démocratie républicaine responsable ne peut pas survivre éternellement sans individus responsables.

L’impossibilité de parvenir à cette conscience et d’agir en regard des valeurs humanistes qu’elle véhicule par la majorité des membres de celles-ci montre qu’elles butent sur un mur dont il faut se demander sérieusement s’il est fait de briques que l’on peut desceller les unes après les autres comme l’espéraient ses premiers promoteurs ou s’il est constitué d’un béton armé inattaquable.

La réalité actuelle semble malheureusement devoir privilégier la deuxième composition.

La montée des populismes où les revendications égocentriques ne sont aucunement contrebalancées par des comportements altruistes en est une preuve tout comme les comportements égocentriques dans cette crise pandémique que nous vivons en ce moment où l’on entend plus des récriminations sur le devoir faire attention à l’autre, le plus faible et le plus exposé au virus – cet autre qui serait un empêcheur de jouir –, que la reconnaissance de l’obligation morale de respecter l’autre en appliquant les règles sanitaires pourtant d’une simplicité extrême mais, oui, contraignantes.

Cette situation se retrouve dans le monde entier et pas seulement en France.

De même, il ne faut pas obscurcir à l’extrême le tableau, beaucoup de personnes agissent de manière responsable et respectueuse de la dignité de l’autre.

Cependant, 244 ans après la guerre d’indépendance des Etats-Unis, 231 ans après la Révolution française qui furent des moments-clés dans l’émergence de la démocratie républicaine et de régimes s’en réclamant, force est de constater que nous sommes encore loin de pays composés que de citoyens, pire, que cet espoir d’émancipation qu’elle porte a été détourné vers des aspirations uniquement narcissiques, pour la satisfaction unique des égos et de plaisirs immédiats.

Ce qu’il faut bien comprendre ici, le point essentiel, c’est que la faillite de l’individu responsable – qui n’est pas encore totale et peut-être pas inéluctable – sera suivie très vite de celle de la démocratie républicaine.

La découverte de vaccins et de traitements pour soigner la covid19 est un espoir que nous voulons tous voir réaliser au plus vite pour sauver le plus de vies possibles et nous permettre de ne pas sombrer dans le chaos politique, économique, social, sociétal et international.

Mais, sur le fond, cela ne règlera pas la question existentielle de l’individu responsable.

Et une fois cette crise terminée, elle n’aura sans doute même pas été un élément de prise de conscience sur la nécessité d’un vivre ensemble humaniste comme nous l’enseigne malheureusement l’Histoire.

 

Alexandre Vatimbella

05 octobre 2020

Au nom de quoi les démocrates devraient se contenir devant les populistes et les extrémistes?!

Quand j’entends que le débat Trump-Biden a été une défaite de la démocratie, je suis malheureusement d’accord.

Quand je lis que cette démocratie a encore une fois été ridiculisée, je suis encore d’accord, toujours malheureusement.

Quand j’entends et je lis que c’est une responsabilité collective, là, je crie au mensonge et à la manipulation.

Ce n’est pas parce que les défenseurs de la démocratie – en l’occurrence Joe Biden dans ce cas – désormais refusent de plus en plus de faire profil bas face aux agressions de ses ennemis, ce qu’ils ont fait pendant trop longtemps afin de n’être pas associés aux beuglements et aux insultes des extrémistes et des populistes, et choisissent enfin la nécessaire confrontation en répondant directement et fermement à ceux-ci, qu’ils doivent être considérés comme coresponsables du climat haineux, violent et nauséabond que ces factieux ont sciemment instauré pour affaiblir et détruire la démocratie.

Pourquoi, nous, les démocrates, nous devrions demeurer doctes, mesurés, voire même résignés devant les vomissures des populistes, des démagogues et des extrémistes qui salissent sans cesse la liberté, l’égalité, la fraternité et les valeurs humanistes?

Nous prend-on pour des grands crétins ou des gros naïfs à qui l’on dit de se pencher un peu plus pour que le coup de pied dans le derrière fasse un peu plus mal?!

Devons nous attendre que la situation devienne encore plus grave qu’elle ne l’est actuellement pour nous révolter et montrer que nous ne nous laisserons pas faire.

L’Histoire nous apprend que nous avons souvent réagi trop tard.

Joe Biden a décidé de refuser de subir les mensonges, les insultes, les provocations, les attaques et les intimidations de Trump et il a bien fait.

Non pas que nous devions nous réjouir que le débat politique atteigne cette intensité dans l’affrontement et qu’il devienne une guerre plutôt que la confrontation des idées mais l’époque est à la défense sans concession des valeurs, des principes et des règles démocratiques.

In fine, s’il est préférable de s’exprimer avec civilité, respect et dignité, n’oublions jamais qu’hier comme aujourd’hui ou demain, que ce n’est pas l’enrobage des extrémistes et des populistes qui est l’essentiel du péril qu’ils représentent et de l’abîme vers lequel ils tentent de nous précipiter mais le fond de leur pensée et leurs intentions.

Qu’ils l’expriment avec vulgarité, brutalité et agressivité, c’est un moyen de frapper les esprits et de prétendre, en bombant le torse, qu’ils sont plus forts (physiquement) et puissants que les démocrates afin d’impressionner le plus grand nombre.

C’est ici que les démocrates ne doivent plus céder un pouce de terrain dans la situation actuelle de la société mondiale et des sociétés démocratiques de plus en plus gangrénées par l’hydre autoritaire qui, une fois qu’elle s’installe débouche le plus souvent sur un régime totalitaire à terme.

Alexandre Vatimbella

22 septembre 2020

Le courage de la liberté

Le problème le plus profond de nos démocraties actuelles n’est-il pas que les personnes qui y naissent n’aient jamais eu à se battre pour conquérir la liberté qui leur est offerte si tant est qu’elles aient l’envie et le vouloir de l’exercer.

Or c’est bien là le point crucial: la liberté n’est pas gratuite et en l’offrant sans compensation autre qu’une promesse tacite d’en faire bon usage, on fait croire, en réalité qui n’en est qu’une fausse, que la liberté ne vaut rien.

Or la liberté a un prix qu’il faut accepter de payer pour la pratiquer.

Bien entendu, il n’est pas acceptable de supprimer la liberté de chaque humain qui nait en démocratie mais il faut que ceci s’accompagne, le plus précocement possible d’une éducation à la liberté qui passe par une sorte d’acquisition de celle-ci où chacun doit être conscient qu’il est redevable constamment de posséder ce bien si précieux.

Autrement, il ne peut que penser que la liberté est un objet de peu de valeur puisqu’on la lui donne sans aucune contrepartie et qu’il peut en faire ce qu’il veut même la jeter aux ordures, même la vendre au plus offrant, comme une sorte d’escroc, alors qu’il l’a acquise gratuitement!

Ceux qui ont du se battre pour acquérir la liberté savent très exactement son prix au cent près, notamment dans les pays qui furent des dictatures totalitaire lors de leur naissance et d’une parti de leur existence.

Mais ce n’est pas le cas de ceux qui l’on trouvé dans leur berceau à côté d’un ours en peluche et d’un hochet, bercés par la douce mélodie d’une boite à musique et des objets défilants devant ses yeux.

Dès lors, c’est par le courage d’être libre qu’ils doivent en payer le prix ou alors dire qu’ils y renoncent pour eux-mêmes mais ne pouvant évidemment jamais la rejeter pour les autres.

Parce que l’on est détenteur uniquement de sa propre liberté et rien ne nous permet de mettre en gage celle de l’autre.

Ce courage est de se mobiliser sans cesse pour, non seulement, protéger la liberté mais aussi la faire vivre dans le respect de la liberté de l’autre.

Oui, nous devons savoir que nous déboursons de nous-mêmes pour posséder cet extraordinaire mais exigeante compagne qu’est la liberté.

Si tel n’est pas le cas, elle est ramenée à une sorte d’objet publicitaire distribué par la démocratie et, comme tout objet de la sorte, on le ramasse, on le met dans un tiroir jusqu’au jour où on le jette faute de s’en être servi et de l’avoir entretenu.

En ce début de troisième millénaire où certains pensent que la liberté est une survivance néfaste du passé quand d’autres estiment qu’elle permet tout et n’importe quoi (ce qui, en l’occurrence, s’appelle la licence), qu’elle est l’absence de contraintes – ce qui soi dit en passant est ne rien comprendre à son essence – en oubliant que son autre face s’appelle responsabilité, nous devons devenir des courageux de la liberté si nous voulons, nous et nos enfants et les générations futures, encore goûter à ses fruits délicieux mais qui comme presque tout ce qui est bon n’est jamais facile à attraper dans l’arbre de la vie parce qu’étant plus proche e la cime que du tronc même si elles vivent grâce aux racines profondes que d’autres courageux, avant nous, ont créées en semant les graines adéquates.

Parce qu’il vaut toujours mieux profiter de ce que l’on a que de devoir le conquérir faute d’avoir su sa valeur.

Alexandre Vatimbella

 

03 mars 2020

Seule la démocratie est «naturelle»

Pour beaucoup, la démocratie c’est le règne du peuple et de sa majorité, le premier étant détenteur de sa légitimité, la seconde étant détentrice du pouvoir.
Une grossière erreur (volontaire?) qui a permis à tous les ennemis de la démocratie de l’instrumentaliser afin de prendre le pouvoir grâce à une majorité dans les urnes puis de supprimer cette même démocratie au motif que les électeurs auraient voté dans ce sens.

En réalité, la démocratie est le règne de la liberté et de l’égalité des chances, le tout dans le respect de chacun.

Et cela change tout.

Foin de «peuple» et de «majorité» pour la justifier.

Car, si elle ne dépend, ni du peuple, ni de la majorité pour exister et fonctionner, la démocratie est alors le régime «naturel» qui ne peut être supprimé car ce «naturel» est sa reconnaissance indépassable en dehors même de tout élément extérieur à l’individu.

Pas naturel au sens qu’il existe dans la nature mais parce qu’il est celui où l’individu est le mieux à même de se réaliser et de vivre sa vie, ce qui permet à la communauté d’être la plus équilibrée possible.

Ce «naturel» s’exprime, dans le cadre de la société par cette notion fondamentale issue des Lumières, les «droits de l’humain» (que certains, dans une démarche aussi vieillotte que misogyne continuent à appeler «droits de l’homme…).

Ces droits sont attachés à l’humain indépendamment de son appartenance à la société et sont donc «naturels» en ce qu’ils préexistent à cette appartenance et ne peuvent donc pas être supprimés par ladite société, même par une décision «démocratique» à la majorité, plus, même par un vote unanime car elle ne dépend pas du bon vouloir d’une communauté, fut-elle unanimement d’accord pour se passer de ces droits mais bien de ce qui constitue l’individu lui-même et, à ce titre, ne peut lui être retirer ou dont on peut le priver parce que ce serait le nier dans son individualité.

Si l’on utilise le terme de «droits» pour qualifier les attributs spécifiques qui s’attachent à l’humain pour mieux les considérer comme irréfragables, inattaquables et incontestables, qu’il n’est pas possible et permis de supprimer, c’est afin de les protéger et de garantir l’essence même de ce qu’il est qui est, bien entendu, au-delà même d’une simple notion juridique.

Ceci a une conséquence primordiale.

Ainsi, quel que soit le résultat d’une élection, celle-ci ne peut jamais aboutir à la suppression du droit de vote et de la liberté d’expression de même qu’aux droits fondamentaux de l’humain (que l’on appelle communément «droits de l’homme»).

Droits de l’humain qui sont la bête noire de tous les adversaires de la démocratie qui ne manquent jamais de les attaquer au motif fallacieux qu’ils seraient soi-disant des dangers pour la cohésion de la communauté (alors que ce sont leur dévoiement qui en sont la cause).

Toute société qui déciderait ces suppressions serait donc illégitime et l’individu serait en droit de se révolter et de lui résister.

D’où d’ailleurs l’existence de nombreux régimes illégitimes sur la planète.

Cela signifie également que quelle que soit la faction qui l’a emporté, elle doit garantir les libertés de la minorité et revenir devant les électeurs aux dates prévues par les textes dont la constitution.

Aucune majorité n’est donc légitime à supprimer la démocratie mais aucune minorité, non plus, n’est légitime à bloquer le fonctionnement de la démocratie.

Car c’est bien la majorité qui gouverne et aucune minorité ne peut lui dénier ce pouvoir issu des urnes si il est exercé conformément aux règles démocratiques générales (qui sont souvent contenues dans des constitutions ou des lois dites fondamentales mais qui peuvent être également implicites dans celles-ci).

Ces règles sont celles que j’ai explicité plus haut, c'est-à-dire toutes celles qui garantissent l’existence d’une démocratie et qui en font le régime «naturel».

Cela signifie que tous ceux qui ne respectent pas ces règles se mettent «hors la loi», non pas parce qu’ils transgressent des normes mais parce qu’ils dénient à chacun ses droits et ses libertés, c'est-à-dire la Loi avec un grand L du respect de la dignité humaine.

Nous ne sommes pas dans une sorte de débat idéologique mais dans le très concret de ce qu’est la démocratie et qui la rend «naturelle»: la possibilité de chacun de vivre son projet de vie dans le cadre de lois qui lui garantissent ses droits et ses libertés.

Les adversaires de la démocratie prétendent qu’ils ont le droit de la détruire, notamment s’ils sont majoritaires parce que la démocratie n’est qu’un régime politique comme un autre, donc qu’il n’a aucune légitimité supérieure.

Voilà bien une prétention qui est aussi surréaliste que d’affirmer avoir le droit de tuer parce que la vie et la mort sont deux états de l’individu sur Terre et que la vie ne saurait avoir une légitimité supérieure…

Comme la vie de chaque individu que la société se doit de protéger, elle se doit de respecter et protéger sa dignité et son individualité.

C’est en cela que la démocratie est un régime «naturel» et c’est en cela que la société doit empêcher que l’on confisque à tout individu sa dignité et son individualité comme interdire qu’on lui confisque sa vie.

Parce que le tenant de régimes autoritaires ou totalitaires estime que son droit et sa liberté lui permet de supprimer ceux de l’autre, donc il s’estime plus important que cet autre, plus égal que tous les autres.

On comprend bien l’inanité d’un tel raisonnement qui ne s’appuie sur aucune légitimité autre que la capacité à être plus fort et plus violent, donc à imposer une volonté à un autre qui n’est pas la sienne.

Dès lors, ce n’est qu’en respectant chacun dans ses droits et ses libertés que l’on respecte son individualité, donc sa nature profonde.

C’est en cela que la démocratie est le régime «naturel».

Cela ne signifie malheureusement pas qu’elle est indestructible.

Non, elle est aussi fragile que la nature, aussi à la merci de sa destruction par certains.

Comme la nature, elle doit donc être protégée des actions humaines qui peuvent l’anéantir.

Il ne faut donc pas faire une interprétation erronée de ce que j’entends par «naturel» en ce qui concerne la démocratie.

Il ne s’agit pas de justifier la démocratie par la nature humaine ou par les comportements humains en prétendant que ce régime serait le plus adaptée à celle-ci et à ceux-là.

Parce qu’alors, comme Hobbes ou Platon, on pourrait trouver toutes les objections à la démocratie démontrant que les humains ne sont pas faits pour la liberté dans la responsabilité et avancer de multiples raisons fort convaincantes parfois.

Non, le côté naturel de la démocratie n’est pas dans ce qu’il est au plus près de ce qu’est l’humain avec toutes ses qualités mais aussi ses défauts, ses capacités et ses manquements.

D’autant qu’il est évident que si l’on établissait un régime en rapport aux comportements humains sans médiation d’une autorité de «régulation», il y a fort à parier que nous ne serions pas dans en démocratie…

Sans oublier que, sans être défendue, la démocratie ne peut survivre.

Le «naturel» vient de ce qu’elle est le seul système capable d’offrir à tous un cadre qui leur permettent le meilleur vivre ensemble dans la liberté de chacun, c'est-à-dire dans la possibilité de chacun d’être au mieux ce qu’il est et ce qu’il veut être.

D’autres systèmes permettent à certains de se réaliser pleinement, voire, peut-être à la communauté de bénéficier d’avantages de meilleure qualité que ne peut offrir la démocratie.

Mais aucun d’entre eux n’est en capacité d’offrir à tous, sur un pied d’égalité, la possibilité de construire et mener son projet du mieux possible.

Ici, je suis bien conscient de l’objection principale qui va être faite à cette thèse: la réalité actuelle de la vie dans les pays démocratiques ne démontre pas de manière indiscutable qu’elle permet réellement d’offrir cette capacité.

Oui, c’est vrai mais c’est aussi vrai que ces pays ne sont pas des modèles de démocratie, c'est-à-dire qu’ils sont des démocraties inachevées ou des pays où le processus démocratique n’a pas encore fini de structurer correctement la société.

Cette réalité n’empêche pas que, dans l’absolu, la démocratie avec ses règles, ses valeurs et ses principes, soit le meilleur système possible et le seul qui puisse revendiquer le qualificatif de «naturel» en regard de ce qu’il est le seul à pouvoir offrir à tous ceux qui vivent sous son régime d’être en possibilité d’utiliser au mieux pour ses intérêts et ceux de la communauté, son individualité.

A contrario, on voit bien que les régimes autoritaires et totalitaires n’ont rien d’humaniste en ce qu’ils créent des coercitions empêchant l’individu de pouvoir se réaliser en toute liberté et en toute responsabilité.

Dès lors, il est également possible de qualifier par ce biais, la démocratie de naturelle tout simplement parce qu’aucun régime qui lui est opposé ne peut avoir cette qualité, pire, est à l’opposé de pouvoir y prétendre.

Par quelque bout qu’on prenne cette problématique, on abouti toujours à ce que la démocratie est bien «naturelle» mais qu’elle est aussi le seul régime politique naturel.

Ce rappel n’est pas inutile en ce début de troisième millénaire où la démocratie est attaquée de toutes parts avec la montée du populisme et de l’autoritarisme mâtinés de nationalisme qui revendiquent être les seuls à même d’incarner le peuple et la nation.

Car, même si cette imposture était vraie, elle ne changerait rien en ce que la démocratie est le seul système de gouvernement légitime dans le monde, hier, aujourd’hui et demain, parce qu’il est le seul qui garantisse à chaque individu d’être ce qu’il est dans le respect de l’autre, de ce qu’il est et de son existence.



Alexandre Vatimbella

21 février 2020

La démocratie, plus belle ou pire des choses?

Quand les règles de la démocratie sont utilisées à bons escient pour assurer la liberté dans l’égalité, pour progresser dans l’émancipation de chacun dans le cadre d’une communauté solidaire et respectueuse qui en bénéficie tout autant que l’individu, c’est certainement le plus beau système politique qui puisse exister.
Mais quand ces mêmes règles sont utilisées pour des buts essentiellement égoïste et clientéliste, d’opposition des uns contre les autres, quand la liberté d’expression est instrumentalisée et devient une arme pour menacer l’autre et lui dénier sa propre liberté de parole, quand on justifie l’insulte et la violence comme modes d’expression légitimes alors qu’elles nient l’existence même des valeurs démocratiques que l’on prétend défendre par leur utilisation, alors elle devient un des pires systèmes de gouvernement parce qu’elle dévoile les travers les plus exécrables et les plus hideux des individus avec cet effet boule e neige qui peut devenir terrifiant.
Si l’on ne doit pas passer sous silence les succès évidents de la démocratie, il convient, tout autant de ne pas se taire sur ses dérives.
Et ici, je ne parle même pas de la plus extrême, celle qui a permis, en toute légalité «démocratique» de permettre à des dictateurs de prendre le pouvoir par les urnes…
La démocratie est un système de gouvernement qui a des objectifs bien précis: la liberté, l’égalité, la solidarité (fraternité), la tolérance, le respect de la dignité de chacun par un gouvernement élu par la majorité des citoyens et dont un des devoirs est de protéger les droits de la minorité, le tout dans la sécurité et la paix civile.
Cette mission ne peut être réalisée qu’avec la participation et l’adhésion des citoyens.
Or ce qui fait la beauté de ce système est ce qui en fait aussi sa faiblesse parce que les citoyens, s’ils sont garants de ses bienfaits, sont également les complices de ses éventuelles dérives et perversion, soit directement par un activisme et des comportements qui instrumentalisent les bienfaits pour en faire des outils contre les valeurs mêmes de la démocratie, soit de manière indirecte en laissant faire (et parfois en les soutenant) des groupes subversifs qui s’attaquent frontalement ou dans l’ombre à ces mêmes valeurs.
Parce que si la démocratie est légitime à revendiquer d’être le régime «naturel», c'est-à-dire celui qui possède la légitimité ultime d’être le modèle de gouvernement des humains, sa construction culturelle est une lutte contre ce qui est le plus négatif de la nature humaine.
Ici, j’utilise l’adjectif «naturel» à la manière de Locke et des libéraux: la démocratie est «naturelle» parce que c’est elle qui est le mieux à même de réaliser les projets de vie des individus dans le cadre du meilleur projet de vie collectif.
Mais l’on comprend bien qu’elle est, dans les faits, totalement et complètement à la merci des «humeurs» de ses garants, c'est-à-dire les citoyens.
Ceux-ci, en tant qu’entités créatrices légitimes de la démocratie sont à même de l’appliquer correctement ou de la dénaturer, voire de la supprimer.
Or, la dénaturation et la suppression ne devraient pas être possibles si la démocratie est le régime naturel par excellence, parce qu’il doit s’appliquer quel que soit l’envie ou la volonté des citoyens.
On touche là à une des fragilités constitutives de la démocratie, sa dépendance au bon vouloir de ses garants alors même qu’elle doit pouvoir garantir à chacun de ses membres le respect de ses valeurs quel que soit la volonté d’une majorité, fut-elle de tous moins un, voire même de tous au regard des générations futures.
Mais comment faire autrement que de donner le pouvoir aux garants qui sont en même temps les bénéficiaires du système démocratique?
Si ces garants-bénéficiaires ne la soutiennent plus, aucune loi, aucune action, aucune résistance n’est réellement possible devant l’intention majoritaire ou unanime de l’abattre, que ce soit dans les urnes ou par la violence.
De même, de la laisser en vie et de s’en servir contre les valeurs mêmes qu’elle défend comme cela s’est déjà produit dans l’Histoire.
Que faire alors afin de permettre que le meilleur système n’accouche pas d’un monstre comme ce fut le cas en Allemagne en 1933 ou qu’il devienne une «dictacratie», ce mélange de régime autoritaire, de pratiques populistes et de résidus de mécanismes démocratiques (que d’autres appellent, improprement selon moi, «démocrature»)?
Retirer le pouvoir au «peuple», en tant qu’entité qui incarne ceux qui bénéficient de la démocratie et qui en sont les garants n’est évidemment pas possible même si cela serait souhaitable lors d’épisodes critiques comme celui que je viens de citer.
Nous devons donc accepter la fragilité et la faiblesse inhérente à la démocratie, savoir qu’elle est le meilleur régime et que son dévoiement tourne rapidement au cauchemar.
Mais cette acceptation n’est pas et ne doit pas être renoncement.
Ainsi, la démocratie nécessite et nécessitera toujours un activisme constant pour la défendre.
Une des grandes erreurs de beaucoup de ses défenseurs et de ses prosélytes a été de croire que les bienfaits de la démocratie en feraient un système indestructible «par nature».
Rien n’est plus faux
Dans leur analyse, ils avaient plus ou moins complètement oublié que la liberté est un état qui nécessite la prise en charge par chaque individu de la responsabilité de sa vie (en prenant les décisions qui vont, en partie, en faire ce qu’elle va devenir) et celle de ses actes vis-à-vis d’autrui.
Or, nombre de gens ne veulent pas de cette double responsabilité qui les oblige et préfère le «cocon» de l’incapacité et de la débilité tout en revendiquant malgré tout d’être le centre du monde et de bénéficier entièrement des bienfaits sans en accepter les obligations inhérentes qui y sont attachées.
Dès lors, tout en sachant que le pire est toujours possible mais pas forcément inévitable, tous ceux qui défendent la démocratie doivent faire en sorte de la promouvoir constamment, de la solidifier par la loi et par des mesures concrètes comme la constante élévation du niveau culturel des populations et, surtout, dans la réalisation effective des promesses contenues dans ses valeurs tout en étant conscients que tout interférence inhérente à la vie sur Terre sera généralement portée au passif de cette démocratie par ses garants, le peuple.
Si la démocratie est ce gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, elle ne doit jamais être laissée au bon vouloir du peuple et à ses humeurs.
Plus facile à dire qu’à faire mais si l’on y parvient et pour répondre à notre question, alors la démocratie est la plus belle chose.
Mais que la route semble encore longue.

Alexandre Vatimbella


11 février 2020

Et si les pères de la démocratie nous avaient cru plus intelligents que nous ne le sommes?

Les populistes démagogues le répètent sans modération, dans une litanie qui a fait leur succès:
«Les puissants, les gens de la haute vous méprisent, vous prennent pour des imbéciles, vous roulent dans la farine grâce à ce régime de la démocratie qui n’est en fait qu’un moyen de leur domination, qu’un leurre pour vous amadouer.»
Ces diatribes antidémocratiques sont aussi vieilles que l’établissement de la démocratie moderne elle-même et elles ont pris des tournures inquiétantes qui ont abouti à des cataclysmes et des tragédies qui ont marqué l’Histoire.
Aujourd’hui elles connaissent un nouveau regain, toujours véhiculée par les mêmes idéologies mortifères.
Pourtant, il y a une autre explication à ce «décrochage» entre les «élites» (ou considérées comme telles par ces populistes démagogues) et le «peuple» (entité fantasmée par ces mêmes populistes démagogues), entre la démocratie représentative et libérale et une partie de la population.
Et celle-ci serait qu’au contraire de prendre les gens pour des imbéciles, les pères de la démocratie moderne les avaient cru plus intelligents qu’ils ne le sont.
Oui, ils pensaient avec optimisme et espérance mais également avec conviction que la démocratie et ses valeurs humanistes possédaient cette évidence qu’elles étaient au service des personnes quand ce sont les personnes qui sont au service des régimes autoritaires et totalitaires et que le peuple en serait aisément convaincu grâce aux vertus de la liberté dans l’égalité et de l’égalité dans la liberté, le tout garanti par la loi.
Oui, ils étaient persuadés que l’individu préfère sa liberté à ses chaînes et que cette démocratie aurait la même une évidence pour lui.
Ceux qui mirent en place cette démocratie pensaient qu’elle s’imposerait comme une flagrance avec son idéal émancipateur qui permettrait de prodiguer à tous l’enseignement et l’information nécessaires qui aboutiraient à faire de chacun de nous, quel que soit nos aptitudes intellectuelles et émotionnelles, une personne éclairée, responsable de sa vie et respectueuse de celle des autres, comprenant où est son intérêt.
Or, alors que le plus vieux régime démocratique moderne se rapproche de ses 250 ans d’existence, voilà que nous nous rendons compte que nous sommes toujours et encore des êtres qui peuvent croire à tous les bobards même les plus délirants, à toutes les croyances même les plus improbables, à toutes les idéologies même les plus sanglantes, à tous les personnages ambigus même les plus dangereux, que nous critiquons sans cesse la démocratie, la rendant responsable de tous nos maux, que nous sommes prêts à donner ses clés à ses ennemis les plus déterminés et que nous en redemandons souvent et sans modération!
Oui, force est de constater que les pays démocratiques ne sont pas composées de ces citoyens éclairés et responsables, que nous manquons souvent du plus élémentaire bon sens, que nous ne sommes pas capables d’avoir une réflexion sans préjugés sur les faits qui se présentent à nous, que nous préférons souvent ignorer le réel pour nous réfugier dans un monde fantasmé.
Que ce soit parce que nous sommes à la recherche de sens d’une vie qui semble souvent en manquer ou parce que nous ne parvenons pas à rationaliser les choses ou que ce soit pour un autre motif, la réalité est bien celle-là, de cette espérance qui ne s’est pas réalisée mais sur laquelle nous nous sommes appuyés pour assoir un régime pour lequel nous nous rendons compte que ne nous ne sommes pas encore préparé à le faire fonctionner.
Le pire est que nous nous sommes accommodés de cette situation plus que bancale que nous connaissons depuis longtemps, incapables de faire surgir des limbes de l’ignorance et de l’obscurantisme une personne instruite, avisée, sensée dotée d’un minimum de sagesse et que nous avons, dans la foulée, dévoyé petit à petit l’idéal démocratique.
Ainsi, au lieu de l’approfondir en investissant massivement et constamment dans la formation et l’information d’un citoyen conscient et responsable, pierre angulaire de la réussite du projet démocratique, nous avons cru pouvoir régler l’incapacité de l’être humain actuel à maîtriser le fonctionnement de la démocratie à la manière de tout système bâti sur la négation de l’existence d’un individu émancipé en lui donnant, pour le faire adhérer à cet idéal, du pain et des jeux.
Ceux-ci se sont appelés, entre autres, «croissance économique» à tout va et anarchique qui nous revient dans la figure aujourd’hui, «société de consommation» du tout, tout de suite et plus encore et «culture populaire» niaise et abrutissante avec la vénération de la réussite matérielle.
Le matérialisme trivial, l’avoir, comme succédané au spirituel, l’être, voilà bien l’erreur commise sciemment devant la difficulté de construire un «peuple» démocratique.
Non pas que l’amélioration des conditions de vie et la montée des loisirs soient négatifs, bien au contraire.
Mais ils ne pouvaient en aucune façon remplacer une adhésion à la démocratie du fait qu’elle est et restera «le» seul et unique régime émancipateur de l’être humain indépendamment de toute gratification matérielle.
Voilà donc ce qu’est largement devenu aujourd’hui en grande partie le projet démocratique et le projet républicain où nous avons créé des êtres accros à l’avoir et inapte à être de manière consciente et irresponsable.
Ajoutons immédiatement que ces êtres ont été largement coopératifs, voire enthousiastes, dans ce processus.
Mais avec la disparition d’une croissance forte et la progression constante de l’insatiable désir de consommer et de posséder qui nous frustre plutôt qu’il nous libère ainsi que cette propension à nous abrutir plus que de nécessaire dans la pratique active ou passive de loisirs décervelants, nous creusons la tombe de la démocratie au lieu de travailler sans relâche à créer cet individu instruit et donc éclairé, le seul qui peut vivre en démocratie et faire vivre la démocratie.
Ceci pose évidemment deux problèmes principaux.
Le premier est de se demander comment résoudre ce hiatus entre le fonctionnement d’une démocratie et l’incapacité dans laquelle nous sommes de l’appréhender et de l’apprivoiser.
Le deuxième est de se demander comment protéger cette même démocratie des agissements destructeurs de ceux à qui pourtant elle est destinée, qui, seule, peut garantir les droits de l’individu dont sa liberté, face à nos insuffisances qui la mette en péril.
L’évidence est que ce n’est pas le système qui est la cause de ses dysfonctionnements mais que celle-ci vient bien de ceux à qui il est destiné.
De même, ce n’est pas ces puissants et ces élites qui l’empêchent de fonctionner mais notre ignorance et notre bêtise à nous tous.
Faisons donc en sorte de nous améliorer pour mériter de vivre en démocratie au lieu de puiser dans nos médiocrités pour tenter de l’abattre.
Cela est possible mais requiert un volontarisme de tous les instants ainsi qu’un optimisme basé sur le réalisme et non un fatalisme, voire un renoncement, parce que la démocratie n’est pas un régime «naturel» qui s’imposerait sans rien faire.
Nous avons sans doute oublié que la loi du plus fort, du plus malin, du plus rusé et non une véritable méritocratie est la règle depuis la nuit des temps et que, seule, notre souhait de vivre libre et en paix, égaux et solidaires soutient cette démocratie fragile que nous devons protéger à chaque instant et devant tous ses ennemis dont, souvent… nous-mêmes!
Oui, sans doute, nous pouvons et devons travailler à cette œuvre émancipatrice que seul le régime démocratique permet.
Mais, force est de reconnaître que nous n’y sommes pas encore parvenus.
Le cauchemar serait que nous n’en soyons jamais capables.

Alexandre Vatimbella

09 février 2020

La démocratie est-elle stupide?

Insultes, mensonges, moqueries, menaces, violences, tromperies, détournements, instrumentalisation, exploitation la démocratie reçoit des coups de tous les côtés, tous les jours, attaquée de l’intérieur comme de l’extérieur.
Cela a toujours été le cas même si, par moments, les attaques ont été plus nombreuses et virulentes comme c’est sans doute le cas actuellement.

Face à une telle déferlante de haine et de défiance à son égard, sa réponse semble souvent complètement hors de la réalité, d’une faiblesse coupable.

Dans un immobilisme et une inertie incompréhensibles, elle semble méjuger et sous-estimer les menaces qui pèsent sur son existence même dans une sorte d’incapacité constitutive.

Pire, elle semble être honteuse de ce qu’elle est.

Ainsi, on reste encore aujourd’hui assez sidéré par la facilité déconcertante avec laquelle le fascisme et le nazisme ont pu s’imposer dans deux pays démocratiques, l’Italie et l’Allemagne (le communisme, lui, s’est quasiment toujours établi dans des pays qui n’étaient pas démocratiques).

De même, à notre époque, les succès et/ou la montée en puissance des populistes et des extrémistes dans nombre de pays démocratiques rend mal à l’aise et tend à faire penser que, peut-être, la démocratie n’a pas la capacité de s’opposer à ses ennemis.

Alors, une question vient spontanément à l’esprit: est-elle stupide?

Deux réponses semblent s’imposer:

La première est que la démocratie est fragile.

On ne le redira jamais assez, elle n’est pas un régime «naturel» mais bien une construction culturelle qui permet à l’individu d’être libre et égal dans un monde dominé généralement par l’asservissement et le rapport de force.

Cette fragilité constitutive fait qu’elle est souvent démunie face aux assauts et autres coups de main de ses adversaires qui connaissent bien ses points faibles.

La deuxième est que la démocratie est, in fine, ce que nous en faisons.

En clair, elle n’est qu’un kit de construction que nous avons à notre disposition et que nous devons utiliser pour bâtir notre société en regard des valeurs de référence qu’elle nous indique.

Le résultat de notre édifice n’est donc pas ce qu’est la démocratie dans l’absolu mais bien ce que nous avons construit grâce à ce kit et par rapport à ces valeurs, c’est-à-dire un système qui tend vers la démocratie sans jamais se confondre totalement avec elle.

Mais, plus grave, nous pouvons assez facilement pervertir la démocratie en instrumentalisant et pervertissant ses règles et ses principes, même ses valeurs.

Cela peut être le fait de la majorité de la société mais également de groupes particuliers (sans parler évidemment d’acteurs extérieurs).

Dès lors, non, la démocratie n’est pas stupide mais naïve, au bon sens du terme, une naïveté qui fait sa qualité.

Ce n’est donc pas à elle de nous protéger mais à nous de le faire pour qu’elle nous délivre tous ses bienfaits.

C’est à nous d’être les gardiens de la démocratie dans une mobilisation et une vigilance constantes et non de considérer qu’elle est un roc indestructible et une donnée intangible, ce qu’elle n’est pas et ne sera jamais.

Dans ce troisième millénaire naissant, les défis qui sont devant elle sont vertigineux et elle ne pourra les relever que si elle est sans cesse fortifiée par notre volonté de vivre libres et égaux, solidaires et tolérants dans le respect de la dignité de chacun.

Sinon, elle mourra.

Jamais de sa faute mais uniquement de la nôtre.

Jamais de sa stupidité mais de notre imbécillité.

Avec cette autre question métaphysique et angoissante: l’humain mérite-t-il vraiment la démocratie?

J’aimerais répondre que oui…



Alexandre Vatimbella