Depuis, nulle part, une «parfaite» démocratie n’a existé et aujourd’hui encore nombre des promesses de son projet politique restent à réaliser.
Cependant, reconnaissons qu’avec près de deux siècles et demi de fonctionnement, elle a tout de même progressé et a ouvert de nouveaux champs de liberté, d’égalité et de fraternité aux peuples qui en bénéficient.
Néanmoins, la question cruciale en regard de la situation actuelle est de se demander si ces derniers sont capables de pratiquer la démocratie du 21e siècle ou s’ils ne sont pas encore assez formés pour cela et, question subsidiaire, s’ils le seront un jour…
Si l’on prend comme exemple le peuple étasunien puisqu’il en a été le premier bénéficiaire, force est de constater que l’on reste à tout le moins dubitatif…
Depuis l’an 2000, quatre présidents ont exercé le pouvoir: George W Bush, Barack Obama, Donald Trump et Joe Biden, deux républicains et deux démocrates.
De même, au Congrès, républicains et démocrates ont eu, à leur tour, la majorité à la Chambre des représentants et au Sénat, actuellement les premiers tenant la première et le second la deuxième.
La liberté existe notamment celle de pensée, d’opinion, d’expression et de la presse.
Chacun est, selon la loi, égal à l’autre.
Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes?
Absolument pas!
Si ces faits ne sont pas contestables, ils n’indiquent pas la trajectoire et celle-ci pose nombreuses interrogations sur l’avenir de la démocratie républicaine qui pourrait être, in fine, un accident de l’Histoire.
Notons d’abord que le système électoral américain à deux niveaux (le peuple élit des grands électeurs par Etats qui élisent le président de la fédération) a permis à deux présidents d’être élus alors qu’ils n’avaient pas la majorité des voix (George W Bush face à Al Gore et, surtout, Trump face à Hillary Clinton) et qu’ils étaient tous les deux des républicains radicaux.
Le premier a engagé les Etats-Unis dans une guerre illégitime en mentant à son peuple contre l’Irak (quoi qu’on pense du dictateur sanguinaire qu’était Saddam Hussein) et le deuxième a été l’ami des dictateurs qui haïssent les Etats-Unis et a tenté un coup d’Etat pour demeurer au pouvoir après sa défaite en 2020 face à Joe Biden avec plus de 7 millions de voix de retard.
Et Bush a été réélu en 2004 (avec cette fois-ci la majorité des voix) malgré ses mensonges tandis que Trump pourrait bien revenir au pouvoir à la fin de cette année alors qu’il est actuellement à égalité dans les sondages avec Biden...
Comment un peuple démocratique qui peut se former et s’informer a pu réélire un va-t-en-guerre menteur et s’apprête peut-être à le faire pour un apprenti dictateur d’extrême-droite?
Ici, force est de constater une inadéquation entre le projet démocratique et l’utilisation faite par un peuple vivant en démocratie.
Ce questionnement rejoint celui de cette perméabilité d’une grande partie du peuple américain aux fake news, aux thèses élucubrationistes (complotistes) et à l’admiration de personnages qui ne doivent au départ leur célébrité qu’à la naissance (Bush et Trump) et à la télé-réalité (Trump).
La démocratie avait comme principale mission pour pouvoir exister d’avoir des citoyens ayant reçu un enseignement les rendant capables de ne pas tomber dans les mailles des charlatans de la pensée et les illusionnistes qui leur promettent le paradis ou, au contraire, attisent leur haine contre de soi-disant «ennemis» qu’il faut éliminer.
Des citoyens qui devaient restés «au courant» grâce à une information la plus objective possible afin de ne pas être victime d’une propagande de populistes sans vergogne.
La faillite semble ici d’une énormité angoissante.
Sans parler d’une absence de consensus sur les valeurs humanistes, la société américaine ayant toujours été divisée mais semble l’être encore plus en ce début de troisième millénaire alors que la démocratie républicaine aurait du la souder sur celles-ci ainsi que sur les règles et les principes démocratiques qui sont universalistes.
En outre, l’esprit de responsabilité qui est indispensable au bon fonctionnement de la démocratie républicaine existe peu et est totalement absent d’une partie importante de la population.
On peut bien sûr citer cet électorat de droite et d’extrême-droite qui vote pour un populiste dangereux comme Trump mais il ne faut pas oublier cet électorat de gauche et d’extrême-gauche qui a fait perdre Clinton en 2016 face à lui et qui s’apprête à le refaire cette année avec Biden en décidant de ne pas aller voter (certains estimant même que Trump et Clinton-Biden, c’est bonnet blanc et blanc bonnet dans la pure tradition d’une extrême-gauche qui ne jure que la par la révolution prolétarienne qui ferait un sort à la démocratie républicaine).
La pratique démocratique aux Etats-Unis, au lieu de tendre vers l’universalisme a également été confisquée par des groupes culturels, religieux, ethniques et genrés ce qui a abouti à la mise en place d’un communautarisme qui revendiquent chacun que la démocratie lui octroi une sorte de sur-égalité par rapports à ses «concurrents» dans une vision de victimisation où l’autre est responsable de sa persécution et de toutes les injustices qu’il prétend vivre avec raison ou non.
Le wokisme, notamment par le détournement des études intersectionnelles en est l’illustration tout comme la remontée en puissance du suprémacisme blanc qui n’avait jamais disparu.
On est loin d’une fraternité qui est un ciment indispensable pour faire fonctionner correctement la démocratie.
Force est de constater que le peuple américain n’a ni la conscience, ni les comportements d’un peuple démocratique.
En revanche, il utilise en les subvertissant, les libertés démocratiques de manière d’autant plus dommageable qu’il refuse la responsabilité qui s’attache à l’état démocratique.
En ce sens, il démontre l’inadaptabilité d’un peuple vivant en démocratie au 21e siècle à vivre en peuple démocratique.
Ajoutons tout de suite qu’à peu de chose près, une étude sur n’importe quel autre peuple d’u peuple démocratique aurait donné le même résultat.
Alexandre Vatimbella
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