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08 février 2025

Plus grand-monde ne veut être «au service des autres»

«Au service des autres», cette notion a perdu non seulement son attractivité mais également de son attraction en tant que mission estimée et estimable.

Désormais, une majorité de personnes considère que le service rendu à l’autre – gratuit ou rémunéré – c’est se rabaisser, c’est être un inférieur, c’est abandonner sa fierté, c’est être le larbin des autres, l’opprimé, une sorte de serf ou d’esclave moderne…

Une complète aberration car «rendre service», «être utile» dans son activité professionnelle, «servir à quelque chose» donne souvent du sens à son existence, apporte cette vraie fierté de celle qui élève et permet de l’estime de soi.

Toujours est-il que du serveur de restaurant au médecin, en passant par l’enseignant ou le journaliste, le service aux autres est en crise.

Pas de la même manière.

Pour l’emploi de serveur ou la profession de médecin et d’enseignant, c’est une «crise des vocations».

Les restaurants ont du mal à trouver du personnel tout comme les hôpitaux et les écoles en partie parce qu’il faut s’occuper des autres.

Dans d’autres cas, comme les journalistes, ce n’est pas une crise des vocations mais la notion même du métier – ici, donner de l’information aux autres – qui est contestée pour être remplacée par des sortes de tribunes libres continuelles où l’information n’est plus qu’un moyen de se mettre en avant et non une fin.

De nos jours être influenceur sur les réseaux sociaux où l’on parle sans fin de soi, de sa vie, de ses choix, de sa vision du monde, etc. est bien plus prisé comme activité et pas seulement parce que l’on peut faire fortune.

Influenceur c’est pouvoir être dans l’égotisme total où l’autre n’est qu’un faire-valoir qui vous fait gagner de l’argent tout en lui délivrant sa bonne parole sur tout et n’importe quoi tout en se mettant en scène dans des vidéos à son propre culte.

«Recruter» un influenceur est donc beaucoup plus facile que de recruter un enseignant, un médecin, une infirmière, un policier ou un pompier.

Faire de la politique de nos jours ne consiste plus souvent à rendre service aux autres mais à se mettre en scène, à poursuivre un plan de carrière et à briller dans les médias.

Dans cette dernière activité, créer le buzz est bien souvent plus important que de participer concrètement à la direction du pays et à régler les problèmes, ce qui amène à être dans le spectacle permanent avec une volonté d’être glorifié et non dans une mission où prime la notion de devoir envers la société, d’être à son service.

Rien ne permet de dire que l’on peut inverser cette tendance parce qu’elle est la conséquence de l’évolution de nos sociétés modernes avec la montée de l’autonomisation égocentrique des individus qui est de plus en plus prégnante et qui s’accompagne d’un comportement irresponsable, irrespectueux et d’une demande d’assistanat.

Et c’est l’objectif même de la démocratie républicaine libérale qui est corrompu.

Car le projet démocratique est bien de permettre à l’individu d’être de plus en plus autonome afin de prendre sa vie en charge mais tout en étant responsable de ses choix et de les assumer tout en respectant la dignité de l’autre mais aussi la communauté dans laquelle il vit.

Or cette autonomisation débridée et uniquement tournée vers soi sans assumer les responsabilités et les devoirs qui vont avec envers l’autre et sa communauté provoque des comportements où l’on considère que tout ce qui n’est pas une déférence à soi des autres est un abaissement inacceptable de sa personne.

Le bien vivre ensemble, voir le vivre ensemble tout court, est donc menacé de se transformer en espace de continuelles revendications autocentrées et dont la crise du service aux autres en est un des phénomènes les plus emblématiques.

Alexandre Vatimbella

 

05 février 2025

Les réseaux sociaux jouent désormais contre la démocratie républicaine

Il est rare qu’un raciste défile tout seul dans une ville avec banderole, mégaphone et autres ustensiles du parfait manifestant en éructant des propos abjects.

Une foule, elle, le fait.

Ce n’est évidemment pas une découverte tant les phénomènes de foule avec leurs comportements haineux et violents ont été documentés.

Les lynchages aux Etats-Unis au cours des deux derniers siècles en sont parmi les exemples les plus répugnants.

Or donc pour déverser sa haine, sa rage, ses insultes et inciter à la violence, il vaut mieux se réunir à la fois pour voir qu’on n’est pas le seul à les partager et pour se donner du «courage» ou plutôt pour se chauffer les uns les autres pour devenir des haineux et souvent passer au stade supplémentaire de brutes belliqueuses protégées par ses congénères.

Mais il n’était pas toujours facile de se retrouver et de se mobiliser dans l’«ancien temps» quand internet n’existait pas même si les chasses aux sorcières sont souvent parties des places de village ou des tavernes, voire des lieux culte...

Depuis une vingtaine d’années, les réseaux sociaux ont permis ces rencontres et ces mobilisations.

Citons-en deux particulièrement emblématiques: le mouvement du Tea party aux Etats-Unis en 2008 et celui des Gilets jaune en France en 2018.

Et il y en a qui ont compris tout l’intérêt d’utiliser ces nouveaux moyens de communication: les populistes et les extrémistes.

Ainsi du Tea party récupéré par l’aile extrémiste du Parti républicain et des Gilets jaunes récupérés par LFI et le RN.

Des populistes et des extrémistes qui ont compris également que les médias, notamment audiovisuels et plus particulièrement les chaines d’info en continue, seraient friands de cette soi-disant «colère du peuple» et feraient les parfaits vecteurs de leurs mises en scène haineuses.

Pendant longtemps, les réseaux sociaux ont prétendu qu’ils n’étaient que les messagers ou les entremetteurs mais qu’ils ne pouvaient être tenus pour responsables de leur survenance.

Et pour prouver leur «innocence», ils acceptèrent de mettre en place des services de modération et de fact-checking afin de neutraliser tous les appels à la violence ou les insultes les plus abjectes.

Mais les masques viennent de tomber.

C’était déjà le cas avec Twitter devenu X dans les mains de l’extrémiste libertarien Elon Musk.

C’est maintenant le cas avec Facebook et Instragram.

Et l’on ne parle même par de réseaux sociaux moins grand public mais qui s’étaient fait une spécialité dans ce «laisser-faire» tel Telegram ou Truth (le réseau social fondé par Trump).

On peut dire, dorénavant, que les réseaux sociaux qui furent, au départ, considérés – avec une certaine naïveté pour certains et un cynisme certain pour d’autres – comme des outils pour approfondir la démocratie républicaine et vendus comme tels par leurs initiateurs et créateurs, sont devenus des armes contre celle-ci.

Dès lors, on ne peut plus avoir ce regard bienveillant sur leur existence et sur leur capacité à devenir de vrais vecteurs de la démocratie républicaine sans un cadre réglementaire contraignant.

Il y a désormais une nécessité, surtout une urgence d’une législation dans toutes les démocraties du monde et, en Europe, pour l’UE avec, comme sanction ultime l’interdiction de ceux qui ne la respecteraient pas.

Croire et faire croire que ces outils sont neutres et s’autorégulent est un mensonge qui déstabilise petit à petit la démocratie au nom de la liberté qu’elle offre et que les réseaux sociaux n’hésitent pas à transformer en licence et en arme contre cette même démocratie avec des propriétaires qui, outre leur motivation à gagner le plus d’argent possible, ont la fâcheuse tendance à se prendre pour les maître du monde et à vouloir abuser du pouvoir qu’ils ont acquis pour diffuser leurs thèses nauséabondes.

Et l’on ne peut plus faire semblant de ne pas savoir alors que la mascarade a pris fin avec le coming-out extrémiste de personnages comme Musk ou Zuckerberg et que l’on connaît désormais avec précision l’utilisation par la dictature chinoise des données de TikTok.

Alexandre Vatimbella

 

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